« 18 heures, tu as pris ton après-midi ? » Entre blague potache et reproche, cette question loin d’être anodine en dit long sur le rapport au travail des Français. Comme si travailler longtemps allait automatiquement de pair avec « travailler bien ». Et pourtant : le présentéisme, difficile à repérer, peut se révéler néfaste pour l’entreprise et ses collaborateurs. Alors, les absents ont-ils toujours tort ?

Un mal très français ?

Selon une étude européenne menée par l’entreprise Fellowes en 2017, les entreprises françaises et espagnoles sont les plus touchées par ce phénomène. Si en France on met en avant les « bûcheurs », « bosseurs » et autres « machines », au Danemark ou au Canada, pas question de rester trop tard au travail. Celui qui s’attarde est mal organisé dans son travail, ou fuit ses problèmes personnels : bref, c’est mal vu.

Une autre étude menée par Malakoff Médéric en 2018 révèle que 23% des salariés français ne respectent pas leur congé de maladie : 8% l’ont pris partiellement, 15% pas du tout. Parmi eux, 49% disent regretter ce choix. Le sociologue Denis Monneuse explique : « on parle de surprésentéisme quand une personne déclare être venue travailler au moins une fois dans l’année, alors que son état de santé aurait nécessité un arrêt maladie. »

Une étude menée par Opinionway pour Horoquartz en 2018 révèle par ailleurs que 46% des salariés français ont le sentiment de travailler plus que ce qui est attendu. Parmi eux, 47% dénoncent une surcharge de travail, 43% invoquent la passion, 20% regrettent une mauvaise organisation du travail et 10% ont peur de passer pour des salariés peu impliqués.

Des conséquences pour la santé des salariés… et de l’entreprise

A première vue, le présentéisme est bénéfique à l’entreprise. Des collaborateurs qui travaillent plus sont forcément heureux et loyaux ! Pas si simple. D’abord, parce que rester de longues heures au bureau ne veut pas dire que le travail est (bien) fait.

Ensuite, parce que les coûts cachés du présentéisme sont conséquents. Théorique (car non mesurable directement), le coût du présentéisme est estimé entre 13,7 et 24,9 milliards d’euros par an, selon une étude Midori-Consulting. Contrairement à l’absentéisme, le coût de la baisse de productivité résultant du présentéisme est assumé directement par l’employeur : l’entreprise a donc tout intérêt à s’en prémunir !

Le présentéisme est bien évidemment tout aussi néfaste pour la santé des collaborateurs et est, bien souvent, une signe avant-coureur de l’absentéisme. Selon Thierry Rousseau, chargé de mission pour l’Agence Nationale pour l’amélioration des conditions de travail, « le présentéisme favoriserait l’apparition de pathologies qui affectent sensiblement les salariés : aggravation des maladies, retards dans les processus de soin, voire décompensation et burn-out. » L’étude Malakoff-Médéric révèle par ailleurs que les salariés regrettant de ne pas avoir pris l’arrêt maladie prescrit pointent du doigt un impact sur leur productivité (45%), leur qualité de vie au travail (38%)… et sur leur santé (29%). 24% révèlent que la maladie a duré plus longtemps, et 22% confient avoir subi une rechute. 22% des arrêts maladie de plus de 30 jours sont d’ailleurs liés à des troubles psychologiques ou à une grande fatigue, qui trouve peut-être son origine dans le non-respect des arrêts prescrits.

Enfin, symptomatique d’une productivité en baisse, d’une qualité du travail moindre et d’un climat social dégradé, le présentéisme a également un « coût d’image » non négligeable, côté clients ou candidats (marque employeur).

Mieux vaut prévenir que guérir ?

La question mérite d’être posée : comment prévenir le présentéisme alors même qu’il est très difficile à repérer ?

Il va sans dire que la QVT (Qualité de Vie au Travail) est un axe majeur dans l’équilibre et le bien-être physique et mental des collaborateurs. Instaurer le droit à la déconnexion, permettre le télétravail (souvent contrepartie à une absence totale), donner de la souplesse dans les horaires… ne sont que quelques exemples.

Une autre solution consiste à mettre en place une solution de gestion des temps et des plannings dédiée. Les heures supplémentaires récurrentes, les congés non pris, les comptes épargne-temps qui débordent… sont ainsi clairement mis en évidence et aident les Directions des Ressources Humaines à prévenir et détecter le présentéisme. Les outils de gestion de plannings permettent en parallèle aux managers de réguler la quantité de travail de chacun, en veillant à l’équilibre des équipes.

Dans tous les cas, il s’agit avant tout d’être exemplaire, pour déculpabiliser les absents potentiels. Pour en finir avec la culture du présentéisme profondément ancrée dans les comportements…et contribuer par-là même à la baisse de l’absentéisme !

Source : https://www.blog-gestiondestemps.fr/presenteisme-les-absents-ont-ils-toujours-tort/